Atelier de l'Université de Rentrée à Lomme de la Fédération du Nord du PS, 10 septembre 2011
Lors de l'université de rentrée à Lomme, le 10 septembre 2011, l'atelier sur l'Europe animé par Anne Wetzel, Secrétaire Fédérale à l'Europe et aux relations internationales, nous a permis d'aborder les enjeux actuels de la crise de l'euro.
Avec Michel Delebarre, Maire de Dunkerque et Vice-président du Comité des Régions, ainsi que Claude Nicolet, adjoint au Maire de Dunkerque en charge des relations internationales et Premier Secrétaire de la fédération du Nord du MRC, nous avons débattu des solutions à apporter pour sortir de la crise actuelle mais également relancer le projet européen autour d'un modèle social renforcé.
La crise de la solidarité européenne
L'intégration européenne se trouve en effet à la croisée des chemins. Certaines propositions actuelles en matière économique, notamment sur la création d'une gouvernance économique européenne intégrée, auront des conséquences profondes sur nos politiques économiques, sur les évolutions salariales et les politiques sociales. Cependant, l'approche actuelle, essentiellement autour du couple franco-allemand, n'offre aucune perspective si ce n'est celle de mesures additionnelles d'austérité qui constituent l'alibi pour le démantèlement des services publics et la libéralisation.
Par son intervention, Michel Delebarre a souligné les difficultés de réorienter le projet européen dans un sens social, au regard notamment de la difficulté à imposer par exemple une directive-cadre sur les services publics. Se fondant sur les débats sur l'avenir de la politique européenne de cohésion, dont certains Etats membres veulent le démantèlement, il a illustré par ces propos les différentes formes que prend la crise actuelle de la solidarité européenne. Le Maire de Dunkerque et Vice-président du CdR a cependant souligné le caractère crucial d'un projet européen qui soit territorialisé et ancré dans les territoires. Il est donc important, dans cette perspective, de ne pas aller dans le sens d'une renationalisation de la politique régionale.
Une réforme radicale du fonctionnement libérale de l'UE
L'intervention de Claude Nicolet s'est quant à elle concentrée sur les solutions alternatives à mettre en avant pour changer le cours de la gouvernance européenne. Il a ainsi souligné la possibilité que ce soient essentiellement les ménages qui possèdent la dette des Etats, ce qui diminuerait la vulnérabilité de certains gouvernements à l'égard de leurs créditeurs. Il a également souligné que les missions de la Banque Centrale Européenne (BCE) pouvaient être revues pour qu'elles intègrent les objectifs de croissance et de plein-emploi à ses missions.
En effet, la politique monétaire telle qu'elle est décidée par la Banque Centrale Européenne (BCE) a des incidences majeures sur les évolutions salariales dans la mesure où la maîtrise de l'inflation implique de limiter l'augmentation des salaires. .
Vers une sortie de crise progressiste
Si l'euro a permis une certaine stabilité économique dans les premiers années de sa circulation, la crise actuelle de la dette née des déséquilibres causés par les subprimes a révélé qu'il fallait revoir le projet d' Union Economique et Monétaire et le compléter en mettant en place d'autres politiques économiques. L'euro s'est forgé une réputation solide et crédible de devise internationale. Aujourd'hui, une stabilité des prix guide le comportement des agents économiques, même dans des pays qui auparavant connaissaient une forte inflation. Dans le cadre de l'appartenance à la zone euro, les primes de risque ont chuté et tous les pays participants ont bénéficié de faibles taux d'intérêts réels et nominaux.
De manière assez surprenante, selon le FMI, le déficit public de la zone euro devrait être de 4.6% du PIB en 2011. Malgré une situation critique dans certains Etats membres, ce taux reste largement en deçà des valeurs observées dans les autres grandes régions du monde: un chiffre qui est de moitié inférieur aux 10,8% attendus aux Etats-Unis et aux 9,1% annoncés par les prévisions de janvier au Japon.
Malgré ces succès relatifs, la crise de 2008-2011 a révélé certaines asymétries dans le fonctionnement de l'Union Economique et Monétaire, notamment le déséquilibre entre le volet "monétaire", dans l'ensemble accompli avec succès, et le volet "économique" qui reste toujours incomplet, et qui occupe actuellement les débats sur la gouvernance économique européenne.
Le fonctionnement de la zone euro est actuellement confronté à une série de difficultés: une autorité monétaire centralisée confrontée à de nombreuses politiques économiques souvent caractérisées par un manque de coordination; un Pacte de Stabilité et de Croissance (PSC) qui montre des déficiences en matière de contrôle des finances publiques et qui s'avère inefficace lorsqu'il s'agit de favoriser des politiques de croissance; et une intégration financière croissante couplée à l'absence de règles et de pratiques de supervision communes.
Il faut reconnaître aujourd'hui que les solutions avancées sont faites par des gouvernements qui sont majoritairement à droite. 22 Etats sur 27 sont dirigés par des gouvernements conservateurs. Malgré ce rapport de force, il faut mettre en avant certaines propositions.
Tout d'abord, il faut remédier aux lacunes et faiblesses du secteur financier en brisant le lien qui existe entre les fragilités du secteur bancaire et les budgets des pouvoirs publics. Jusqu'ici, le soutien financier aux banques a bénéficié d'une attention trop soutenue, au détriment de l'élaboration de restructurations dignes de ce nom.
La Taxe sur les Transactions Financières et les pistes pour renforcer l'investissement public en Europe
Cette taxe peut se justifier au regard de l'impact sur les dépenses publiques causé par le sauvetage du secteur financier. Cet impact direct sur les finances publiques a été analysé par la Commission européenne: les aides publiques effectivement mises en jeu entre octobre 2008 et octobre 2010 ont atteint 1 107 milliards d'euros, dont 840 milliards d'euros (67%) sous forme de prêts et de garanties pour faciliter le maintien du crédit interbancaire. Au total, les aides publiques concrètement versées dans l'Union se sont établies à 237 milliards d'euros en 2008 et 351 milliards d'euros en 2009, dont 132 milliards d'euros consacrés à la recapitalisation du secteur bancaire et 100 milliards d'euros au cantonnement des actifs toxiques. La dette publique des pays développés a augmenté en deux ans de 20 points de PIB, ce qui les a exposés à un effort nécessaire d'ajustement estimé de 300 à 370 milliards de dollars.
C'est dans ce contexte qu'en février 2011, lors d'une rencontre à Berlin entre les délégations des groupes socialistes et SPD de l'Assemblée nationale et du Bundestag, il est décidé de proposer dans les deux Parlements une résolution identique appelant l'instauration d'une taxe de 0,05% sur l'ensemble des transactions financières. Ce travail commun engagé entre les deux délégations a conduit à une résolution identique, discutée le même jour, le 9 juin 2011, dans les deux Parlements.
Parallèlement à l'imposition de cette TFF, il est nécessaire également de renforcer l'investissement public en Europe. En effet, au cours des 10 années d'existence de la monnaie unique, la surveillance macro-économique, dévolue notamment à la Commission européenne par le biais du Pacte de Stabilité et de Croissance (PSC), s'est concentrée sur les déficits publics sans que soit considéré l'endettement privé. Dans l'esprit du Traité de Maastricht, toute dépense effectuée par le secteur public apparaissait suspecte alors que les dépenses effectuées par le secteur privé n'apparaissaient nullement suspectes, que ce soit en matière d'investissements privés, de consommation privée, voire de consommation privée financée par l'endettement des consommateurs, les hypothèques, etc.
Il faudra sûrement dépasser cette conception pour permettre de développer au niveau européen des politiques de croissance passant notamment par l'investissement public. C'est dans cet esprit que notre proposition de ne pas inclure les dépenses publiques d'investissement dans l'évaluation des budgets des Etats membres prend tout son sens.
L'investissement doit en effet constituer une composante des politiques européennes qui est encore trop souvent sous-estimée au profit des mesures de marché et de libéralisation. A l'avenir, la croissance économique devra être davantage basée sur l'investissement, si l'on veut que l'Europe remplisse ses devoirs envers les générations futures.
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