Le scandale autour du médicament Diane 35 me rappelle malheureusement celui du Médiator.
Le schéma se répète : Diane 35 est un médicament autorisé pour traiter l'acné. Pourtant, il est prescrit comme contraceptif oral par les médecins et les gynécologues, c'est-à-dire hors autorisation de mise sur le marché. Il est ainsi prescrit à 60 % par les médecins et seulement à 3 % par les dermatologues.
Commercialisée en 1982, en France, sous le nom de Diane, devenue Diane 35 cinq ans plus tard, cette association de oestroprogestative est un traitement contre l'acné principalement utilisé comme un moyen de contraception.
Ce médicament n'a cependant jamais fait l'objet d'une demande d'autorisation dans cette indication et son fabricant, le laboratoire Bayer, n'a jamais fourni de données pour prouver son efficacité contraceptive.
Suite à l'annonce par le Figaro du 26 janvier de sept décès dus à la prise de ce médicament, l'Agence française du Médicament (ANSM) a rectifié en indiquant qu'au cours des 25 dernières années 4 décès et 125 thromboses veineuses étaient imputables à Diane 35.
Cette annonce n'est malheureusement pas une surprise. Ces vingt dernières années, les signaux d'alerte ont été nombreux, tant en France qu'à l'étranger.
Au lancement de la commercialisation du médicament Diane, en 1982, la revue indépendante Prescrire s'inquiétait déjà que "ce médicament anti-acnéique d'indication limitée risquait probablement de devenir un contraceptif largement prescrit".
En 2002, la commission britannique de sécurité des médicaments soulignait la fréquence des accidents thrombo-emboliques et recommandait d'utiliser Diane 35 avec la plus grande prudence, dans des cas très précis d'acné grave et sur une courte durée de trois à quatre mois.
En 2009, des études danoise et hollandaise indiquaient que le risque de thrombose était trois fois supérieur à la normale sous Diane. Il était plus élevé que pour les pilules de 2ème génération et même un peu plus que pour celles de 3ème génération.
L'usage détourné de ce médicament et les risques encourus n'ont cependant pas empêché Diane 35 de devenir un "contraceptif de notoriété publique".
Aujourd'hui, 315 000 femmes prennent ce médicament ou ses génériques. 189 000 femmes indiquent prendre ce médicament comme contraceptif.
Le gagnant dans l'histoire est sans aucun doute le laboratoire allemand Bayer. Un médicament anti-acné, non remboursé, est bien plus rentable qu'une pilule. Diane 35 est très rapidement devenu un des produits phares de Bayer. D'après le rapport annuel 2011 du laboratoire, il était même son 12ème médicament le plus vendu en 2011, rapportant 182 millions d'euros dans les 116 pays où il est commercialisé.
Un tel succès n'aurait jamais été possible sans les médecins, les gynécologues et les autorités sanitaires nationales et européennes.
Ce médicament ne dispose d'aucune autorisation de mise sur le marché sur cette indication contraceptive et n'a fait l'objet d'aucun essai clinique légitimant cette utilisation. Néanmoins, il continue à être prescrit comme "pilule" en Europe.
Les autorités sanitaires françaises ont à maintes reprises interpellées le laboratoire Boyer sans jamais obtenir de réponse. La question doit à présent faire l'objet d'un examen de l'Agence européenne du médicament. Cette dernière est la seule habilitée à exiger le retrait d'un médicament du marché.
C'est pourquoi, je vais interroger l'agence sur l'absence de réaction européenne sur ce scandale, tout en insistant particulièrement sur l'usage détourné de ce médicament, sur les risques encourus par les citoyennes européennes et sur la prochaine remise en cause de l'autorisation de mise sur le marché de Diane 35.
Je vous ferai part de la réponse de l'Agence européenne du médicament dès sa réception.