Notre système agroalimentaire marche-t-il sur la tête? Au milieu des fraudes alimentaires massives et d'animaux d'élevage bourrés d'antibiotiques aux conséquences inquiétantes pour l'homme, la question s'impose et l'inquiétude monte en Europe.
Le marché de la fraude alimentaire est en plein boom : 49 milliards de dollars. C'est le chiffre effarant de la fraude alimentaire dans le monde pour la seule année 2012. Les scandales récents nous ont fait prendre conscience de l'ampleur de ce phénomène inédit. Après le scandale de la viande de cheval transformée en viande de bœuf par la magie des changements d'étiquettes, c'est aujourd'hui le secteur du poisson qui met en lumière les pratiques frauduleuses de l'industrie agroalimentaire. Les taux de fraudes à l'étiquetage du poisson explosent aujourd'hui en Europe. Pour certains poissons, ces taux atteignent 32% de fraudes en Italie, 30% en Espagne, 19% en Irlande... Pour le thon rouge, 80% des poissons étiquetés comme tels n'en sont pas!
Si ces fraudes n'étaient que des valses d'étiquettes le problème resterait dans le registre moral et la tromperie ne serait qu'un pied de nez de plus au consommateur européen. Malheureusement, une horde de problèmes sanitaires font surface : les chevaux utilisés pour réaliser les plats à base de bœuf sont des chevaux de traits remplis d'anti-inflammatoires qui les rendent normalement impropres à la consommation à cause des risques pour la santé, d'autres chevaux, cobayes de l'industrie pharmaceutique, se retrouvent dans nos assiettes... La tromperie se mêle au scandale sanitaire...
Autre avatar de ce système agroalimentaire déréglé et dangereux pour notre santé : le gavage des élevages aux antibiotiques.
En effet, des quantités étonnantes d'antibiotiques sont administrées dans les animaux qui seront ensuite consommés par les humains. Problème : les bactéries combattues deviennent plus résistantes à force d'être en permanence en contact avec une marée d'antibiotiques. Des bactéries survivent et sont donc potentiellement transmissibles à l'homme! Le problème sanitaire est énorme! Sur 100 échantillons de volailles en France c'est ainsi plus d'un quart qui est contaminé par des bactéries dangereuses pour nous. Pire, parmi ces bactéries, 23% sont résistantes à des antibiotiques cruciaux, c'est-à-dire utilisés en médecine humaine en dernier recours pour des pathologies graves... Pour couronner le tout, ce sont les denrées les plus bon marché, celle destinées aux ménages à revenu modeste, qui sont les plus affectées par ce phénomène. Autrement dit, les plus pauvres sont ceux qui ont leur santé la plus menacée...
Le gavage aux antibiotiques de nos aliments n'a pour but que de maximiser la rentabilité du secteur agroalimentaire, au détriment de la santé des européens et de la pérennité même de notre agriculture. Ce problème nécessite une réponse européenne.
Au Parlement européen, je réclame depuis maintenant deux ans au commissaire européen chargé de la santé Tonio Borg, une législation sécurisante et ambitieuse pour remettre notre système agroalimentaire au service de nos concitoyens.
C'est d'abord l'étiquetage obligatoire de l'origine de la viande des plats cuisinés qui doit être mis en place pour restaurer la confiance des européens dans ce système qui les a trop trompé. Ce fut une victoire que de faire inscrire cette mesure dans un rapport parlementaire européen. Il s'agit désormais de la position officielle du Parlement. Je ferai en sorte que la législation finale sur l'information des consommateurs inclut cet étiquetage obligatoire.
Deuxième étape : en finir avec le gavage d'antibiotiques des animaux d'élevage. Il est urgent d'agir et c'est pour cela que j'ai interpellé la Commission européenne afin de la presser d'encadrer ces dangers. Une législation pour diminuer la consommation d'antibiotiques par animal à l'échelle de l'ensemble de l'Union européenne est ainsi une nécessité que je réclame à l'exécutif européen.
J'ai aussi appelé la Commission à être vigilante sur l'avenir de nos normes sanitaires au moment où elle négocie un traité de libre-échange avec les États-Unis. Les américains sont notoirement connus pour avoir des règles sanitaires et alimentaires beaucoup moins strictes que les nôtres. Ne les bradons pas! Le plus petit dénominateur commun ne doit pas devenir la règle dans nos efforts pour protéger la santé des 500 millions de consommateurs européens.
Voilà mes exigences pour protéger notre santé. La sécurité alimentaire doit être l'une de nos préoccupations majeures. On doit y apporter une réponse à l'échelle de l'Union européenne afin de redonner confiance dans une Europe protectrice et avant tout à l'écoute de ses citoyens. Dans une période où la défiance envers la construction européenne touche une audience toujours plus large, nous ne pouvons pas faire l'impasse sur ces choix politiques de premier ordre pour l'avenir d'une autre Europe.
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