L’Union européenne a pris la tête des initiatives internationales de réduction des émissions de gaz à effet de serre dues à l’activité humaine, qui risquent d’altérer sérieusement les conditions climatiques mondiales. Le système communautaire d’échange de quotas d’émission (SCEQE), mis au point par l’Union européenne, est la pierre angulaire de la stratégie européenne pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de façon optimale d’un point de vue coût/efficacité.
Grâce au SCEQE, l’Union européenne devrait atteindre son objectif de réduction des émissions, défini par le protocole de Kyoto, à un coût inférieur à 0,1 % du PIB. Sans ce système, le coût aurait été bien plus important. Ce système sera également essentiel pour remplir des objectifs de réduction des émissions plus ambitieux à l’horizon 2020 et au-delà.
Après une phase pilote initiale d’apprentissage par la pratique de trois ans, des quotas d’émission plus serrés ont été mis en œuvre pour la période d’échanges 2008-2012. Ils représenteront pour les États membres de l’UE un sérieux coup de pouce dans la réalisation des objectifs du protocole de Kyoto.
En 2013, une nouvelle version qui renforcera, étendra et améliorera le fonctionnement du SCEQE entrera en vigueur. Le système pourra alors jouer un rôle central dans la mise en œuvre des objectifs communautaires de réduction des émissions à l’horizon 2020 et au-delà, dans le respect des engagements souscrits par l’Europe en vertu du futur accord international sur le changement climatique, en cours de négociation.
La vente aux enchères de quotas à partir de 2013 deviendra le principe de base d’allocation des quotas et remplacera l’actuel système (attribution gratuite par le gouvernement de la grande majorité des quotas). En effet, ce nouveau système incitera davantage les entreprises à limiter rapidement leurs émissions, sera plus fidèle au principe du « pollueur-payeur » et améliorera l’efficacité, la transparence et la simplicité du SCEQE.
Le secteur de la production d’électricité devra en principe acheter tous ses quotas d’émission à partir de 2013, étant donné que l’expérience a montré que les centrales électriques ont pu transmettre à leurs clients le coût des quotas d’émission alors même que ces quotas leur étaient alloués gratuitement.
Cependant, certains États membres auront la possibilité de déroger temporairement à cette règle pour des centrales électriques existantes. Ils pourront octroyer gratuitement à ces centrales jusqu’à 70 % de leurs quotas d’émission en 2013, mais ce pourcentage devra être diminué à zéro en 2020.
Une règle appelée "10 quater" épargnera donc jusqu'à 2020 les centrales dont le "processus d'investissement " ayant " physiquement commencé" avant le 31 décembre 2008. Pour en bénéficier, les centrales doivent avoir reçu des Etats un permis d'émission de gaz à effet de serre avant le 30 juin 2009. Cette règle empêchera une ruée vers des permis gratuits qui créerait des distorsions sur le marché européen de l'électricité.
Ces dérogations visent à instaurer une économie faible en carbone et ce sans avantage concurrentiel déloyal dans les dix nouveaux Etats membres.
187 installations sont concernées par cette dérogation en Pologne. La somme totale des crédits gratuits demandés s'élève à 7 milliards d'euros.
Euractiv Bruxelles a mené une enquête afin de déterminer l'existence des centrales pour lesquelles des dérogations ont été introduites en Pologne.
A titre d'exemple, le gouvernement polonais a demandé des crédits gratuits à hauteur de 33 millions d'euros pour sa centrale au charbon de Leczna, située près de la frontière ukrainienne. Cette centrale était décrite comme "en travaux".
Arrivés sur place, les journalistes d'Euractiv ont constaté qu'à l'emplacement supposé de la centrale il n'y avait que prairies, champs et chemins forestiers. Aucun bâtiment, aucune installation et aucun signe d'activité n'était visible aux coordonnées transmises.
Douze autres "centrales fantômes" pourraient avoir été identifiées en Pologne.
Ces fraudes constatées m'ont poussé à interroger la Commission européenne. J'ai souhaité savoir si ces dérogations avaient été octroyées suite à une enquête approfondie sur place ou uniquement sur base des dossiers transmis par les autorités polonaises. Pour résumer, la liste des centrales électriques exemptées avait-elle été établie sans que les critères d'éligibilité ne soient vérifiés.
La Commission européenne vient de m'adresser la réponse suivante:
Conformément à l’article 10 quater de la directive 2003/87/CE, les installations peuvent bénéficier d'une allocation de quotas à titre gratuit, même si elles ne sont pas encore en service, à condition que leur «processus d'investissement ait physiquement commencé» avant la fin de l’année 2008. L'évaluation visant à déterminer si certaines installations peuvent bénéficier d'une allocation à titre gratuit a été effectuée sur la base des documents présentés par la Pologne. Dès lors que l'admissibilité d'une installation était dûment établie par ces documents, la Commission n’avait aucun motif juridique de contester cette admissibilité dans sa décision du 13 juillet 2012 concernant la demande présentée par la Pologne en application de l'article 10 quater de la directive précitée.
Les installations en question ne se verront toutefois accorder une allocation à titre gratuit que lorsqu’elles seront entrées en service.
Dans ce contexte, il convient également de noter que, lorsque la Commission avait de bonnes raisons de penser qu'un investissement donné était identique à une installation jugée admissible au bénéfice de l'allocation de quotas d'émission à titre gratuit, elle a rejeté l'investissement correspondant. L'investissement rejeté ne peut en conséquence pas être financé par l'allocation à titre gratuit obtenue grâce à la dérogation. Pour pouvoir effectivement bénéficier de l'allocation, l’exploitant devra financer un autre investissement de modernisation prévu dans la demande.