Le blog de Gilles Pargneaux

Diane 35: Interdiction française et étrange avis de l'Agence européenne du médicament

Depuis mardi, Diane 35 et ses génériques ne sont plus disponibles dans  les pharmacies françaises.

Le retrait de cet antiacnéique largement prescrit en tant que contraceptif avait été annoncé en janvier par l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), en pleine controverse sur les pilules de troisième et quatrième génération.

L'agence estime désormais que le rapport bénéfice/risque de Diane 35 est défavorable, en raison du risque de thrombose veineuse auquel les femmes sont exposées. Elle s'appuie notamment sur une étude danoise de 2011 qui a mis en évidence un risque de phlébite et d'embolie pulmonaire multiplié par quatre chez les femmes recevant Diane 35 (15 événements pour 10 000 patientes), par rapport à celles ne prenant aucun contraceptif.

Cette courageuse décision française risque cependant d’être désavouée.

Vendredi dernier, l'Agence européenne du médicament s'est en effet montrée défavorable à une suspension de l'autorisation de mise sur le marché de l'antiacnéique.

Dans ce premier avis, son comité européen de pharmacovigilance émet tout de même de fortes réserves. Selon lui, Diane 35 devrait à l'avenir être réservé au traitement de l'acné modérée à sévère, chez des femmes en âge de procréer, et en cas d'échec des traitements de première intention. Un contexte de pilosité excessive ou d'hyperandrogénie serait en outre requis.

L'avis précise, par ailleurs, que Diane 35 et ses génériques ne peuvent être combinés à un autre traitement contraceptif, car cela exposerait les femmes à un risque encore plus élevé d'accident thromboembolique. Le comité européen recommande enfin de nouveaux «avertissements à l'attention des patients et professionnels de santé».

Les réserves et les inquiétudes de l’agence semblent aller à l’encontre des conclusions de son avis.

Après ce premier avis, la décision finale reviendra à la Commission européenne. J’espère, bien évidemment, que la Commission s’inspirera du précédent français et retirera ce médicament de la vente en Europe. 

Accord commercial UE-USA : l'Europe doit être exigeante dans la défense de ses spécificités

Le Parlement européen s'est prononcé aujourd'hui en faveur du mandat de négociation à accorder à la Commission européenne en vue de l'accord de partenariat de commerce avec les Etats-Unis.

Grâce au travail réalisé en commission du commerce international du Parlement européen, les eurodéputés socialistes ont apporté une contribution majeure pour améliorer le texte de ce mandat et faire reconnaître les préoccupations françaises. Ils ont obtenu une importante victoire en ralliant les votes sur l'exclusion de la Culture et de l'audiovisuel du champ des négociations ; mais le compte n'y est pas et nous n'avons donc pas soutenu cet accord dans son ensemble.

En l'état actuel du mandat, nous avons mis en garde contre une négociation au terme de laquelle l'Europe serait perdante par excès de naïveté, manque de vigilance et d'ambition. Propriété intellectuelle, indications géographiques, règles sanitaires, protection des données, services publics, défense, normes environnementales, OGM... autant de sujets sur lesquels nous aurions souhaité que le Parlement européen se prononce pour des exigences plus fortes. Nous rappelons que l'Union européenne doit avoir une position forte pour la défense de ses spécificités, de ses préférences collectives et de son modèle social.

La lutte ne fait que commencer. Nous veillerons, tout au long du processus, à ce que les négociations soient transparentes et débouchent sur un partenariat commercial qui préserve les intérêts européens. Quand viendra le moment de se prononcer sur l'accord, nous n'y souscriront qu'à condition que l'Europe et les Européens en sortent renforcés.

L'Europe de l'énergie au service de la relance du projet européen

Si l'ordre du jour du Conseil européen d'aujourd'hui, mercredi 22 mai 2013, a été chamboulé par l'urgence des questions d'évasion fiscale, il ne faut pas que les chefs d'Etat et de gouvernement oublient le sujet principal qui devait être abordé : la politique énergétique de l'Union européenne.

Lors de sa conférence de presse du 16 mai, le Président de la République François Hollande a rappelé sa volonté de voir émerger une communauté européenne de l'énergie. Cette communauté est le pendant de nos volontés de protéger l'environnement et d'assurer l'approvisionnement énergétique des européens dans les années à venir, véritable traduction pratique des nos engagements en matière de lutte contre le changement climatique. En plus des aspects environnementaux, c'est désormais les risques de dépendance énergétique et les défauts de compétitivité impliqués par le prix élevé de l'énergie qui doivent avoir notre attention.

Malgré plusieurs dispositions prises en Europe, le cadre communautaire de ce secteur est fragmenté et les objectifs communs se heurtent souvent à des approches nationales contradictoires. Contradictoires car les choix politiques nationaux ont tendance à occulter l'interdépendance existante entre les pays voisins qui sont rarement consultés dans l'élaboration des politiques de l'énergie. C'est ainsi qu'on aboutit trop régulièrement à des investissements superflus et coûteux pour les citoyens de l'Union.

La communauté européenne de l'énergie doit se construire sur des mesures communes encadrées par le tryptique européen cher à Jacques Delors : la compétition entre opérateurs industriels qui stimule, la coopération entre Etats qui renforce et la solidarité européenne qui unit.

La solidarité qui unit prend la forme de la sécurisation de l'approvisionnement énergétique, c'est-à-dire une approche commune de la diversification des sources d'énergies. Beaucoup d'Etats européens connaissent une forte dépendance énergétique envers un fournisseur étranger. La mise en commun de certaines capacités d'approvisionnement, par le renforcement d'un véritable marché interconnecté, pourra diminuer largement cette dépendance dont les conséquences sont toujours néfastes. Surtout, l'UE doit utiliser au maximum ses pouvoirs de négociations pour la signature d'accord-cadre avec les pays fournisseurs d'énergie. N'oublions pas que les principales ressources énergétiques renouvelables se trouvent dans notre voisinage immédiat, au sud de la Méditerranée. Le projet Desertec, que l'UE ne doit pas cesser de soutenir, prévoit la création de centrales éoliennes et solaires dans le Sahel et pourrait fournir près de 15% de notre consommation d'énergie à l'horizon 2050!

Ces mesures ne pourront prendre forme qu'à travers une plus grande coopération entre les Etats membres. C'est là que des coopérations renforcées entre voisins sont pertinentes afin de plannifier, en fonctions des spécificités de chacun, un mix énergétique optimal.

L'énergie a été un des moteurs de la construction européenne dès la création de la Communauté du Charbon et de l'Acier. Elle peut et doit redevenir ce catalyseur pour que l'Europe puisse relever les défis des décennies à venir et regagner l'adhésion des citoyens dans son projet.

L'Union européenne doit augmenter le financement du Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD)

La commission de l'emploi et des affaires sociales du Parlement européen a adopté lundi 20 mai 2013 la proposition de la rapporteure socialiste irlandaise, Emer COSTELLO, d'augmenter le financement du Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD) de 2,5 milliards pour la période 2014-2020 à 3,5 milliards.

Dans le cadre de ce vote important, je vous invite à retrouver ci-dessous les questions que j'ai posées à Emer COSTELLO à ce sujet et qui figureront dans la section "3 questions à " du prochain numéro de mon Trait d'Union.

3 Questions à Emer COSTELLO, Rapporteure (S&D, Irlande) sur le Fonds européen d'aide aux plus démunis

Depuis la décision de la cour européenne de justice, pouvez-vous nous dire ce qui a été fait par le groupe S&D pour que le PEAD ne disparaisse pas comme prévu en 2014?

À la suite du verdict de la Cour Européenne de Justice, le groupe S&D s'est engagé à ce que le PEAD, qui est opérationnel depuis 1987, continue d'exister après l'année 2013. Après cinq années de crise économique et avec le chômage qui atteint des niveaux que nous n'avons pas observés depuis plus de 20 ans, le niveau de pauvreté en Europe est sans précédent : 120 millions de personnes sont sous le seuil de la pauvreté, 40 millions de personnes souffrent de privation élémentaire sévère et on compte près de 4 millions de personnes sans-abris. Partout en Europe, de plus en plus de personnes sont dépendantes des actions caritatives alimentaires pour survivre.

Nous avons par conséquent bien accueilli la proposition de la Commission européenne en ce qui concerne le Fonds Européen pour l'Aide aux plus Démunis (FEAD) qui reposera sur le Programme de distribution alimentaire en dépassant la simple aide alimentaire dans la mesure où il  fournira aussi des biens de première nécessité. Nous travaillons à l'amélioration de la proposition de la Commission et avons soumis certains amendements dans cette optique.

Bien que nous soyons conscients que le soutien d'urgence envisagé par ce nouveau fonds ne doit pas être considéré comme un produit de substitution à des politiques plus complètes nécessaires pour respecter notre engagement de réduire et d'éliminer la pauvreté, nous sommes convaincus que le fonds pourra jouer un rôle important dans l'amélioration de la vie des personnes en marge de nos sociétés. Ceci leur permettra de vivre une vie digne et de sortir de la pauvreté. Le FEAD est un symbole de la solidarité européenne envers ceux qui ont été le plus affectés par la crise et vivent dans la pauvreté.

Quels sont les principes directeurs du nouveau fonds pour l'aide européenne aux plus démunis et les principaux points litigieux dans les négociations en cours?

Le fonds se focalisera sur les personnes les plus démunies dont les besoins d'assistance sont établis par les autorités nationales ou des organisations partenaires. Son objectif est de fournir de la nourriture et/ou des biens de premières nécessités aux plus démunis. Les États membres planifieraient et fourniraient l'aide de façon cohérente avec leurs plans nationaux et les critères d'éligibilité de l'aide seront également de leurs ressorts. Les organisations partenaires seraient des agences publiques ou des ONG qui mèneraient en parallèle des mesures d'inclusion sociale.

La Commission prévoit un budget de 2,5 milliards d'euros pour la période2014-2020. Les États membres fourniraient jusqu'à 15% des fonds nécessaires, participation qui pourrait être réduite à 5% pour les États bénéficiant d'une assistance financière de l'UE.

Les amendements que j'ai déposés avec d'autres députés européens couvrent un grand nombre de sujets, notamment : renforcer le principe du partenariat avec les parties prenantes à tous les niveaux ; clarifier des définitions telles que "destinataire" et "mesures d'accompagnement" ; s'efforcer de protéger la dignité des destinataires ; lier le fonds avec d'autres politiques européennes telles que la santé publique, les déchets alimentaires, l'environnement... ; simplifier les procédures administratives.

Comment rassurer les ONG suite à la décision prise par le conseil européen de diminuer le financement d’aide aux fonds européens pour les plus d’démunis de l’ordre de 2.5 milliards à 3.5 milliards ?

Une inquiétude demeure, celle que le financement proposé de 2,5 milliards d'euros ne suffise pas pour le FEAD. Le budget proposé est inférieur au budget actuel du PEAD qui est de 500 millions d'euros par an alors que le FEAD a pourtant un champ d'application plus large et prévoit la participation de tous les Etats membres. Avec d'autres députés européens, j'ai soumis des amendements réclamant que le budget ne soit pas inférieur en termes réels à celui de la période 2007-2013 du PEAD.

Bien que seulement 19 Etats membres participent au PEAD, la proposition législative du FEAD envisage la participation de tous les membres de l'Union européenne. Les socialistes européens veulent assurer que la part de l'enveloppe des fonds de cohésion européens dédiée au FEAD soit réservée strictement aux plus démunis. Nous croyons essentiel d'assurer que chaque Etat membre reçoive une allocation FEAD et puisse en faire usage au bénéfice des plus démunis. Cependant, certains députés européens d'autres groupes politiques ont proposé que les Etats membres puissent participer sur une base volontaire au FEAD et que leur non-participation n'affecte pas leur enveloppe globale reçue à titre de la politique de cohésion.